Cinq étapes pour être créatif malgré les contraintes

Les idées révolutionnaires exigent de nouvelles façons de penser et de travailler. Disposer de ressources illimitées et de possibilités infinies peut aboutir à la création de produits incroyablement innovants. Mais le plus souvent, les résolutions de problèmes les plus créatives se produisent dans un cadre délimité.

LA CRÉATION DE SERIES 1

C’est ce qui s’est passé pour Steelcase Series 1 — un nouveau siège de travail signé Steelcase. L’équipe de développement produits s’est vue demander de faire quelque chose que l’entreprise n’avait jamais fait jusque-là : concevoir un siège permettant d’atteindre un nouveau marché proposant des caractéristiques d’ergonomie de premier ordre et un haut degré de personnalisation.

L’équipe de Steelcase Series 1 disposait de ressources limitées. Se refusant à transiger sur la performance, elle devait toutefois réussir à atteindre un niveau de prix accessible. Chaque partie du siège devait être efficace et non pas simplement un élément esthétique. Les membres de l’équipe ont exploré les différentes composantes du processus global de fabrication, d’emballage et de livraison dans le but d’optimiser l’efficacité et la qualité, mais aussi de réduire les coûts.

Les ingénieurs, Bob Battey et Gordy Peterson, ont aidé à mener le projet du concept jusqu’à sa réalisation. Ils nous exposent les cinq étapes cruciales qu’ils ont suivies pour accomplir ce que beaucoup jugeaient impossible.

1. S’ENGAGER ÉMOTIONNELLEMENT

À la suite d’une réunion de projet démotivante organisée outre-Atlantique, assis dans l’aéroport de Francfort, Bob Battey et Gordy Peterson ont alors envisagé d’abandonner. D’autres projets du même type n’avaient jamais réussi à atteindre la phase de commercialisation. Pourquoi poursuivre sur cette voie ?

« Les individus disaient que nous n’y arriverions pas. Nous avons répondu que nous y arriverions, qu’il nous fallait seulement être plus créatifs », explique Gordy Peterson. « Vous devez vous approprier un concept, le nourrir et le développer. Nous avons décidé de le défendre et de le faire nôtre, d’en prendre soin et de l’aimer. » Cumulant 57 années d’expérience dans le domaine du siège, les deux hommes se sont alors promis de faire les choses différemment cette fois-ci.

2. DÉFINIR + EXPOSER LE PROBLÈME

Tout a commencé à l’aéroport avec une simple feuille de papier sur laquelle ils ont défini clairement leur problème et développé la méthode envisagée pour le résoudre. De retour dans leur salle de projet de Grand Rapids, ils ont affiché cette définition au mur de façon permanente.

« Une fois posées par écrit, les choses ne sont plus de simples paroles en l’air. Nous avions besoin d’une chose que les individus pourraient voir et à laquelle ils pourraient réagir », explique Bob Battey. « Nous avons commencé à avoir une vraie discussion ouverte sur ce que nous devions faire différemment. Gordy et moi connaissons la chanson depuis longtemps. Nous savions que la méthode habituelle ne marcherait pas cette fois. »

3. HIÉRARCHISER + VISUALISER LES CONTRAINTES

« Il faut un juste équilibre des contraintes pour pouvoir continuer à avancer, mais suffisamment de liberté pour créer quelque chose de désirable », explique Bob Battey. « Si le cadre est trop large, vous vous retrouvez avec quelque chose d’inaccessible, mais s’il est trop étroit, vous aboutissez à quelque chose d’ennuyeux. »

Les deux hommes ont utilisé leur salle de projet pour exposer une représentation visuelle des contraintes. Si les membres de l’équipe souhaitaient changer une partie du projet, ils pouvaient rapidement voir les répercussions sur la totalité du projet.

« Le fait de voir les contraintes et de les concrétiser a quelque chose de viscéral. C’est à ce moment-là qu’est apparue l’angoisse », affirme Bob Battey. « L’angoisse est une bonne chose si vous souhaitez faire les choses différemment, car cela vous oblige à prendre des décisions difficiles. »

Une fois que les priorités de l’équipe se sont clarifiées, le projet a vite avancé, car les gens pouvaient prendre des décisions plus rapides. Personne n’avait besoin de « vérifier un truc » ou de « revenir en arrière après avoir creusé une question », ce qui arrive bien souvent et qui peut ralentir la progression.

4. COLLABORATION TRANSDISCIPLINAIRE SPONTANÉE

Les deux ingénieurs ont trouvé précieux de pouvoir impliquer d’autres disciplines très tôt. Plutôt que de ne se concentrer que sur le design et l’ingénierie, ils ont aussitôt fait appel à des collègues experts en matériaux, logistique et processus globaux. Chaque équipe a donné son point de vue. Ils ont installé physiquement leur équipe polyvalente dans une salle de projet commune et créé un espace virtuel leur permettant de collaborer sur le projet. Le développement de produit est un processus créatif désordonné. Cet environnement leur a permis d’exposer leurs découvertes, expériences et progrès.

Les deux espaces se sont rapidement remplis d’objets, de modèles et de matériaux ou de vidéos, d’annotations et de découvertes numériques. Leur salle de projet était équipée d’un système de visioconférence pour faciliter la collaboration des équipes nord-américaines avec les autres membres situés en Europe et en Asie. Les deux espaces (physique et virtuel) du projet ont tous deux favorisé des interactions spontanées. Il s’agissait parfois d’une réunion imprévue en présentiel ou bien encore d’une rencontre virtuelle entre un ingénieur américain et un designer à Hong Kong autour d’un document commun menant à une conversation.


5. PROTOTYPAGE RAPIDE

La salle de projet jouxtait l’atelier de modélisation dans lequel les ingénieurs et les designers ont commencé à expérimenter, créant parfois un prototype en seulement quelques jours.

« Le fait que l’espace dans lequel nous générions nos idées et nos concepts se trouve juste à côté de notre espace de fabrication était crucial », indique Bob Battey. « Cela nous a permis de passer rapidement du tableau blanc ou de l’écran d’ordinateur à l’objet lui-même. Nous pouvions essayer des choses et les répéter à petite échelle avant de créer un modèle grandeur nature. »

Ils réalisaient les prototypes une fois par semaine et intégraient le design aux cycles d’apprentissage pour déterminer les variables avec plus de précision. Le résultat : ce fut la génération de concept initial la plus rapide jamais expérimentée par chacun des deux hommes.